LE JOURNAL DU CONSERVATEUR

 

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LE RETABLE DE MOGNÉVILLE DE RETOUR APRÈS 15 ANS D’ABSENCE

SommaireUn des rares retables du XVIe siècle en Lorraine, réalisé pour l’église de Mognéville

Un retable est un élément de mobilier décoratif placé au-dessus des autels, maître-autels et autels latéraux. Orné souvent d’un tableau ou d’une sculpture, surmonté d’entablements ou de frontons souvent majestueux, soutenus par des colonnes, le retable constitue le « centre d’une vaste scénographie savamment orchestrée autour de l’effigie peinte ou sculptée » (Encyclopédie Universalis).

Si la plupart des retables dans les églises de France ont été élevés après le Concile de Trente, certains et parmi les plus anciens, remontent jusqu’au Haut-Moyen-Âge. Le retable de Mognéville quant à lui date du XVIe siècle. Il est l’un des rares de cette époque conservés encore en Lorraine puisqu’il n’en existe qu’un second à Pont-à-Mousson.

(cliché F. JANVIER)
Le Retable de Mognéville restauré réinstallé dans le choeur de l'église de Mognéville
Le retable restauré réinstallé dans le chœur de l'église de Mognéville

Il est constitué d’un buffet en chêne en forme de T renversé dans lequel sont installées 11 scènes sculptées, disposées sous des dais gothiques devant des fonds fenêtrés et comportant plus de 120 personnages et représentant la Passion du Christ depuis le Lavement des Pieds le soir du Jeudi Saint jusqu’à la Résurrection. La scène centrale, la plus importante, est celle de la Crucifixion avec le Christ en croix et les deux larrons, la présence du soldat Longin, de Marie-Madeleine et de la Vierge défaillante soutenue par saint Jean.

Ce retable possède encore ses volets peints latéraux d’origine montrant des épisodes de la vie de saint Rémi, saint patron de la paroisse et des scènes de la vie de la Vierge.


SommaireSon origine

Ce genre de retable, les bois utilisés (chêne pour le buffet, noyer pour les personnages), la dorure et la polychromie rappellent les retables brabançons des XVe et XVIe siècles. Mais les études scientifique et stylistique réalisées à l’occasion de sa restauration par Madame Sophie GUILLOT de SUDUIRAUT, conservatrice en chef au département des sculptures du Musée du Louvre et Monsieur Aubert GERARD, chef de service du Centre régional de restauration des objets d’art de Vesoul ont montré qu’il s’agissait d’une production champenoise. Par comparaison avec les retables de Joinville (Haute-Marne), Lhuître et Lirey (Aube) ce retable pourrait provenir d’un atelier troyen.

Pour la composition des groupes sculptés le ou les artistes se sont inspirés de gravures germaniques qui circulaient abondamment à l’époque dans toute l’Europe. Des historiens d’art du Musée du Louvre ont pu retrouver ces gravures dont les auteurs principaux sont Martin Schongauer (peintre et graveur de Colmar) et Israhel van Meckenem (graveur sur cuivre d’Allemagne du Nord).

D’autre part l’étude dendrochronologique du bois utilisé a révélé que ce retable avait été exécuté à partir d’un chêne du Nord-Est de la France autour des années 1530. Le retable aurait donc pu être offert par le seigneur de Mognéville Claude de Beauvau.


SommaireLe XXe siècle bien près d’être le dernier de sa longue histoire

Malmené au cours du XIXe et du XXe siècles, le retable a été déplacé au moins à trois reprises dans l’église. De l’abside (son emplacement d’origine), il a émigré dans le transept, puis – sans parler de son exil durant les guerres mondiales – il a été déposé dans la petite chapelle au nord du chœur en raison de tentatives de cambriolage dans les années 1970.

Ce dernier emplacement totalement obturé lui a été fatal. Les moisissures se sont développées et les insectes xylophages se sont attaqués aux sculptures. En 1992, les champignons avaient totalement envahi la polychromie et menaçaient de détruire totalement le chef-d’œuvre.

Les photographies ci-après prises en 1988 suffiront à se faire une idée de l’étendue des dégâts.

(Si le diaporama ci-dessous ne s’affiche pas, veuillez installer le plug-in Adobe Flash Player)

(clichés F. JANVIER) Cliquer sur les boutons flèche pour faire défiler les vues

Le retable en 1988 - les dégâts après une vingtaine d'années dans une atmosphère humide

Sommaire
1992, l’heure des décisions énergiques - le retable de Mognéville ne doit pas mourir !
Traitement de choc pour un malade à l’agonie...

Le service des Monuments historiques a pris l’affaire en mains et la même année 1992, le 4 septembre, le retable partait pour Vesoul au Centre de Restauration et de Conservation des Objets d’Art dans l’atelier de Monsieur Aubert Gérard, spécialisé dans ce genre de sculptures. Il a fallu quatre ans pour le désinfecter entièrement et le restaurer (refixages d’éléments, recollages, nettoyage de la polychromie et de la dorure). On a procédé aussi à une étude climatique dans l’église pour déterminer le meilleur emplacement possible.

(clichés F. JANVIER)
 L'entreprise de restauration au travail  
Travaux préliminaires sur place avant le départ du retable à Vesoul
L'entreprise de restauration au travail
L'entreprise de restauration au travail

Parallèlement à cette restauration délicate, l’église a bénéficié de travaux importants : nettoyage général à la suite d’un incendie, restauration totale des voûtes et des murs du chœur et des transepts, réfection des vitraux, remplacement du plancher de la sacristie, mise aux normes électriques, mise en sécurité antivol (alarmes, blindages des portes), etc.

 

SommaireUn résultat exceptionnel

Les photographies ci-après montrant l’état après et avant restauration permettra de juger de la qualité remarquable du travail du restaurateur.

La restauration des sculptures

Les photographies ci-dessous montrent l’état en 2004 après restauration.

Déplacer la souris sur les images pour voir l’état en 1988 avant restauration.

Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 Le Lavement des pieds  
Le Lavement des pieds
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Cène  
La Cène
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 L'agonie du Christ à Gethsémani  
L'agonie du Christ à Gethsémani
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 L'arrestation du Christ au Jardin des Oliviers  
L'arrestation du Christ au Jardin des Oliviers
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La condamnation du Christ à mort  
La condamnation du Christ à mort
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 Le couronnement d'épines  
Le couronnement d'épines
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Flagellation du Christ  
La Flagellation du Christ
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 Le Portement de Croix  
Le Portement de Croix
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Crucifixion au Calvaire  
La Crucifixion au Calvaire
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 Au Calvaire, les soldats s'arrachent la tunique du Christ  
Au Calvaire, les soldats s'arrachent la tunique du Christ
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Résurrection du Christ  
La Résurrection du Christ


La restauration des volets peints

Déplacer la souris sur les images pour voir l’état en 1988 avant restauration.

Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Visitation  
La Visitation
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Nativité du Christ  
La Nativité du Christ
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 L'Adoration des Mages  
L'Adoration des Mages
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 La Présentation du Christ au Temple  
La Présentation du Christ au Temple
Déplacer la souris sur l'image pour voir l'état en 1988 avant restauration - (clichés F. JANVIER)
 Scène de la vie de saint Remi  
Scène de la vie de saint Remi

Sommaire


Le retable de retour après 15 ans d’absence

Le lundi 9 juillet 2007, après 15 ans d’absence, le retable de Mognéville était enfin remis en place dans l’église Saint-Rémi, sur le maître-autel du XIXe siècle. Son absence a duré 15 ans. Le coût global de la restauration a été de 101 483 €, financé à 25 % par la commune propriétaire avec l’aide du Département (25 %) et de l’État (50 %).

Le dimanche 9 septembre 2007, enfin, il était béni par l’évêque de Verdun, Mgr François Maupu, au cours d’une cérémonie religieuse, à l’issue de laquelle l’inspectrice des Monuments historiques, Mme Agnès Sonrier, apporta un éclairage technique sur ce dossier difficile ; après quoi le maire, M. Claude Person, exprima sa joie de voir menée à bien cette lourde opération après tant d’années où la patience de beaucoup fût mise à rude épreuve.

(cliché F. JANVIER)
La bénédiction du retable restauré en 2007
La bénédiction du retable restauré par Mgr MAUPU, évêque de Verdun, le dimanche 9 septembre 2007
(cliché F. JANVIER)
La bénédiction du retable restauré en 2007
La bénédiction du retable restauré, le dimanche 9 septembre 2007 - à droite, le maire, M. Person


SommaireEt maintenant ?

Comme le rappelait Mgr Maupu dans son homélie du 9 septembre, le retable de la Passion est avant tout là pour nous inviter à la conversion, pour rappeler à tous et à chacun qui le regardera ce que le Christ a dû souffrir pour nous racheter et nous donner la Vie éternelle. C’est en cela un objet de culte, de méditation et de prière, tel qu’il l’a toujours été, et c’est pourquoi il a éminemment sa place dans le chœur de l’église.

Mais, comme Monsieur le Maire le disait aussi dans son allocution le 9 septembre, cette restauration n’est que le début d’un nouveau printemps pour le retable car, « au-delà de cet objet cultuel, il est incontestable qu’il doit devenir un incontournable objet culturel du département ».

Et la commune de Mognéville, avec l’aide qu’elle sollicite des différentes instances administratives régionales compétentes ainsi que des hommes de bonne volonté qui y résident, saura, – n’en doutons pas – assumer cette lourde mais, ô combien exaltante responsabilité en vue du bien de tous.


Pour terminer, nous vous proposons une visite en image. Suivez le guide !

 

François JANVIER
Conservateur départemental des Antiquités et Objets d’Art

 

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Date de mise à jour : 23 décembre 2007

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